Si vous n’êtes pas un aficionado des CO (pour les intimes) et que vous tombez sur une pub pour la prochaine course régionale qui se déroulera dans la forêt d’à côté, vous allez avoir besoin d’un petit décryptage . Tout ne coule pas de source à la lecture de ce qu’on appelle « l’annonce de course ».
Prenons l’exemple de la régionale d’Auch qui s’est tenue le 20 janvier 2019 : http://www.ligue-oc-co.com/wp-content/uploads/2018/12/Annonce-Reg-1-AUCH.pdf, extraite de l’excellent site de la ligue régionale d’Occitanie .
Qu’est-ce qu’on trouve sur cette annonce ?
D’abord une première page avec tout un tas d’information dont:
- Les personnes en charge des rôles officiels d’organisation (ça en fait du monde !)
- Sur quel type de terrain vous allez courir.
- Comment trouver le site de course. Ça n’a l’air de rien mais ça peut déjà être une épreuve en soi : il faut déjà trouver où se trouve l’intersection de la D924 avec la D943 !!!!
- Comment s’inscrire, qui contacter, comment ça va vous couter … pas très cher en comparaison aux inscriptions aux trails et autres raids !
- Les horaires de la course et cette expression un peu énigmatique : « départ au boitier ». Lisez cet article et ça vous éclairera
- Vous apprenez également que la course compte pour le « classement national » … ouh la !! Ca doit être du haut niveau, moi qui ne sais même pas me servir d’une boussole, il vaudrait mieux que je m’abstienne !! … Que nenni. Au contraire, c’est la garantie que l’organisateur a respecté un cahier des charges dans son organisation et que l’épreuve devrait être de qualité :-) Un bon label pour venir s’inscrire en fait !
- Et enfin vient le choix du circuit : neuf circuits compétition et quatre circuits d’initiation qui suivent le cahier des charges bla bla bla bla … ron pich ron pich … j’ai rien compris
Aaah chouette, il y a une 2e page !
Ça va nous permettre de mieux comprendre … ou pas Sur cette page, on retrouve un tableau avec dix circuits !!!!
Maiiiiis … euuuh … ils sont où les neuf circuits compétition ?
Le circuit jalonné n’est pas un circuit compétition : le circuit n’est pas officiellement chronométré et peut être réalisé seul ou en groupe, avec l’accompagnement d’un adulte pour les plus jeunes. Avec des jalons positionnés tous les 30 mètres environ, ce circuit est excellent pour apprendre l’autonomie quand on a moins de huit ans et qu’on affronte « seul » la forêt (loup-garous, monstres et autres fantômes ).
Aaaah, ok je comprends. Et pour les quatre circuits d’initiation ?
Déjà on vient de voir le circuit jalonné. Et d’un …
Ensuite, il existe une licence « sport-santé » délivrée par la fédération de CO (FFCO) résolument orientée loisir qui donne accès aux circuits bleu, jaune et jaune long. Et trois de plus … Le compte est bon .
Et le circuit vert alors ?
Euuuuuh … On considère sûrement qu’il est trop facile pour un adulte débutant …
J’ai tenté une réponse, à vrai dire je n’en sais rien :-).
Un guide pour vous aider
Conscient qu’il est très facile de se perdre dans les méandres des réglementations, nos instances fédérales ont créé des grilles pour vous guider. Je vous laisse lire. C’est un bon point de départ. Ça oriente déjà bien le choix. Mais ça soulève encore beaucoup de questions et je vais tenter d’y répondre ici.
Le combo temps / distance / dénivelé
La distance est donnée à vol d’oiseau entre les balises. C’est la distance « trait rouge ». Selon les terrains (plus ou moins traversables) et le niveau technique des coureurs, ça peut être nettement plus long. Un coureur élite ajoute rarement plus de 20% de la distance annoncée tandis qu’un débutant peut parfois la doubler à force de cumuler les erreurs et les détours.
Le dénivelé est calculé par « l’itinéraire optimal » tel qu’imaginé par le traceur. La plupart du temps cet itinéraire minimise le nombre de courbes de niveau à franchir (mais pas toujours), ce qui signifie que cette valeur est souvent une valeur plancher. Là encore en pratique, il n’est pas rare d’ajouter 25% à ce qui est annoncé quand on se sent physiquement fort et que l’on n’est pas soucieux de s’économiser en montée.
Quant au temps du vainqueur, il est calculé en fonction de la « Réduction Kilométrique » (RK) du terrain selon des savants calculs qui considèrent qu’une forêt lambda peut être parcourue à X minutes au kilomètre par les meilleurs régionaux. Cette RK est obtenue empiriquement en analysant les temps des éditions précédentes ou les résultats dans des forêts voisines.
Bref …
Si vous un trailer ou un raider et/ou que vous avez peu d’expérience en orientation, soyez humble et oubliez le critère temps / distance / dénivelé pour faire votre choix de circuit. Donnez la priorité à votre niveau technique.
Les niveaux de couleur
Le ski a ses quatre couleurs pour indiquer la difficulté d’une descente. Le judo a ses ceintures de couleur pour indiquer le niveau d’expérience du judoka. Dans la même veine, la CO a ses circuits de couleur pour indiquer le niveau technique du tracé. La FFCO a créé une méthode fédérale adressée aux traceurs et aux contrôleurs pour les guider dans la conception des parcours. Décryptage …
Note : les mentions (*) renvoient à un glossaire en fin d’article.
Le niveau vert
Sur ce circuit, vous êtes sur des rails et vous n’en sortez pas. Pour atteindre une balise, vous devez suivre une main courante(*), voire deux : chemin, fossé très visible, clôture … La plupart du temps, les balises se trouvent aux points de décision : un carrefour ou une jonction de mains courantes(*). L’idée est de sélectionner alors la bonne pour se rendre au poste(*) suivant.
C’est le circuit de référence des moins de 10 ans.
Le niveau bleu
La progression entre deux balises se fait la plupart du temps par une succession de mains courantes(*). Il peut arriver qu’il faille « couper » et sortir de ces rails, mais la visibilité doit forcément être très bonne (un champs à traverser par exemple). On peut s’en sortir sans boussole avec un rapport carte/terrain(*) propre en s’appuyant sur des éléments évidents du terrain.
C’est le circuit de référence des moins de 12 ans.
Le niveau jaune
Pour aller d’une balise à l’autre, le coureur devra successivement suivre des mains courantes(*), les quitter et rechercher l’un des nombreux points d’appui(*) évidents sur le terrain lui permettant de progresser vers le point d’attaque(*) qu’il aura choisi. A partir de là, il devra se servir de sa boussole pour viser le poste(*). S’il le rate, une ligne d’arrêt(*) évidente lui permettra de stopper sa progression et se recaler(*).
Dans l’exemple ci-dessous, le coureur peut s’appuyer sur la colline, le fossé et la clairière sous le trait rouge pour l’amener à la jonction de chemins à l’ouest du poste(*) qui lui servira de point d’attaque(*). Sa ligne d’arrêt(*) sera le chemin orienté nord-sud à l’est du poste(*).
C’est le circuit de référence des moins de 14 ans.
Le niveau orange
La progression ne se fait plus que par points d’appui(*) successifs. La maitrise de la boussole est indispensable pour ne pas dévier de sa trajectoire. De même, maitriser la lecture du relief et de ses courbes de niveau est indispensable : il faudra parfois utiliser des mouvements de terrain parfois assez fins comme points d’appui(*).
On retrouve toujours les notions de points d’attaque(*) et de lignes d’arrêt(*). Mais l‘attaque du poste(*) peut parfois nécessiter une lecture fine pour décortiquer ce qui se trouve dans le rond. En particulier, comprendre la définition du poste(*) peut parfois sauver de précieuses minutes (en haut ou en bas de la falaise, au nord ou au sud d’un mur …).
Dans l’exemple ci-dessous, les flèches rouges désignent les nombreux points d’appui utilisables pour progresser.
C’est le circuit de référence des moins de 16 ans.
Le niveau violet
Ce niveau nécessite d’avoir acquis tous les fondamentaux des niveaux précédents : progression par points d’appui(*), visée boussole, lecture de tous les types de relief (gros mouvements ou micro-reliefs), interprétation des quatre niveaux de végétation.
Sur ces circuits, le coureur devra utiliser le bon outil au bon moment. Et si le tracé est de qualité et que le terrain s’y prête, il aura utilisé la plupart des outils de son couteau suisse lorsqu’il passera la ligne d’arrivée. En particulier, sur certains interpostes(*), il n’y a pas toujours de point d’attaque(*) net. Il n’y a pas toujours de lignes d’arrêt(*). Les détails sont parfois peu nombreux et les points d’appui(*) n’ont rien d’évident. Dans ce cas, le coureur devra savoir estimer une distance, le nombre de courbes de niveau montées ou descendues, voire réaliser une progression en suivant une ligne de niveau tout en contrôlant sa direction à la boussole.
Ne vous lancez pas sur un tel circuit si vous n’avez aucune expérience en orientation. Ça risque d’être la Bérézina
C’est le niveau de référence pour des adultes de tout âge lors des courses régionales.
Le niveau noir
Là, accrochez-vous, ça déménage La grosse marche avec le niveau violet vient de la capacité d’abstraction et de simplification du problème dont doit faire preuve le coureur : la carte est généralement très dense en information et la meilleure stratégie pour relier un point A à un point B ne saute pas aux yeux lorsque l’on est assis à son bureau. Alors, je ne vous explique même pas en course
Il est possible de s’en sortir en appliquant un rapport carte/terrain(*) strict avec une très grande concentration en combinant boussole et repères visuels mais la progression, même si très sûre, est très lente.
Pour faire un bon résultat sur un circuit noir, il faut être capable d’extraire les bons points d’appui et de lâcher le strict rapport carte/terrain(*) pour se mettre « en route vers » ce fameux point d’appui que l’on recherche, perdu au milieu des nombreux détails de la carte. Ça nécessite d’avoir une grande confiance en soi et dans ses capacités de relocalisation si le point d’appui en question n’est pas trouvé (et ce n’est pas rare ).
Tous les terrains ne permettent pas de fournir des circuits de niveau noir. Il faut en général beaucoup de détails comme dans les cheires auvergnates ou les étendues désertiques du plateau du Larzac.
C’est le circuit de référence des hommes de 18 à 40 ans et des femmes élites de 20 à 34 ans sur les compétitions de niveau national.
(*) Glossaire
Poste : emplacement sur le terrain où est positionnée la balise.
Main courante : élément linéaire que l’on peut suivre aisément sur le terrain tel qu’un chemin, une clôture, un fossé profond …
Rapport carte / terrain : c’est faire le lien entre ce qu’indique la carte et ce que l’on voit sur le terrain. Sans ce rapport-là, pas possible de s’orienter.
Point d’attaque : C’est le dernier point connu sur le terrain avant de partir à la recherche de la balise, le plus souvent par une visée boussole.
Attaque de poste : action de quitter le point d’attaque pour rechercher le poste.
Interposte : liaison à réaliser entre deux postes. On dit aussi « partiel ».
Se recaler : action qui consiste à refaire le rapport carte/terrain alors qu’on l’a involontairement lâché … bref parce qu’on s’est perdu
Point d’appui : élément sur le terrain par lequel on va passer pour progresser vers le point d’attaque. Ça peut être un élément ponctuel (arbre particulier), une surface (marais), un élément de relief (crête) ou même une main courante (segment de clôture).
Ligne d’arrêt : Main courante située après le poste dans le sens de l’attaque de poste, à une distance de 50 mètres à 100 mètres maximum.
Définition de poste : positionnement exact de la balise par rapport à l’élément géographique le plus proche. Exemple : côté ouest du rocher de 2 mètres le plus au sud.
Et maintenant ?
Vous savez tout sur les niveaux de couleur en CO. Rappelez-vous que c’est le niveau technique qui doit guider votre choix et rien d’autre. Dites-vous bien que si vous mettez plus de deux heures sur un circuit, c’est qu’il est trop difficile pour vous pour le moment. Il faut accepter de mettre son ego au placard et descendre d’un niveau technique ou réduire la distance dans le cas d’un circuit violet.
Vous avez maintenant toutes les cartes en main pour faire le bon choix. A vous de jouer !